LES FEMMES
Dans les Contes de Perrault et
les illustrations de G.Doré
La femme a souvent eu une image assez négative. Elle a très souvent été inférieureà l’homme. L’Histoire nous le prouve bien, à commencer par Eve qui a commis lepêché en mangeant le fruit interdit. Dans les
Contes de Perrault plus de la moitié des contes ont pour héroïnes des femmes (:
Griselidis, Peau d’âne, La Belle au bois dormant, Le petit chaperon rouge, Les fées, Cendrillon). Ce qui montre qu’elles ont une importance. Mais cela se rapporte également au fait que les
Contes leur sont destinés. Les femmes sont présentes sous différents âges (jeune fille, femme mariée ou grand-mère), sous diverses nature (humaine ou ogresse) et sous divers statut social (paysanne ou noble). Leur image dans les
Contes est à nuancer : tantôt négative tantôt positive, Perrault nous montre toutes les facettes de la femme afin de nous enseigner des valeurs. En revanche la vision de Gustave Doré dans les illustrations est nettement plus négative.
I) Une image négative des femmes dans les ContesEtre une femme est un statut peu enviable dan les
Contes. Elles sont très souvent vus comme faibles : sans les hommes ou les marraines, les femmes ne sont rien. En effet elles ont beaucoup de défauts, qui sont pour certains
des marques de faiblesse. De plus la vision négative des hommes au sein même des Contes n’arrange pas leur situation.
a) Principaux défautsElles sont souvent curieuses, ce qui leur vaut d’ailleurs d’être punies à plusieurs reprises. La femme de Barbe Bleue a risqué la mort à cause de cette indiscrétion : elle a ouvert le cabinet secret alors qu’on lui avait formellement interdit. Mais ce trait de caractère semble être commun à toutes les femmes vu que les précédentes femmes de Barbe Bleue ont été tuées à cause de ce défaut : “La curiosité malgré tous ses attraits,coûte souvent bien des regrets;on en voit tous les jours mille exemples paraître. C'est , n'en déplaise au sexe, un plaisir bien léger;dès qu'on le prend il cesse d'être,et toujours il coûte trop cher.” La curiosité est donc montrée par Perrault comme un défaut mais on peut se demander si ce n'est pas un peu une qualité.En effet, si la femme de Barbe Bleue n'avait pas ouvert le cabinet elle n'aurait jamais découvert le vrai visage de son mari,sa curiosité a permi de lever les non-dits. Nous retrouvons aussi le défaut de curiosité chez la Belle au Bois Dormant qui se pique avec la quenouille en voulant essayer par l'objet.Curiosité qui fait son malheur.
Elles sont parfois égoïstes. Par exemple les demi-sœurs de Cendrillon ne pensent qu’à elles ; lors de la préparation pour le bal, elles ne parlent que d’elles et de leurs robes. Elles rapportent toujours la conversation à elles.
Les femmes sont aussi futiles, superficielles. Certaines femmes ne sont connues que pour leur beauté. A part ça on ne nous présente rien de bien intéressant sur leur personnalité. Par exemple la Belle au bois dormant n’est connue que pour une caractéristique physique (sa beauté).
La gente féminine est également vu comme impatiente. En effet dans
La Belle au bois dormant, celle-ci déclare au Prince : « vous vous êtes bien fait attendre ». Ce sont les premières paroles qu’elle lui adresse. Elle a dormi cent ans et la première chose à laquelle elle pense est ceci.
Enfin elles sont cupides : elles sont attirées par l’argent et sont prêtes à tout pour être riche. Dans
Barbe Bleue, la fille de la voisine se marie avec « lui » à cause de son argent. Ainsi, la jeune fille au départ se montre assez effrayée par l'apparence de son futur mari mais change bien vite de point de vue lorsqu'elle découvre avec ses amies les richesses que celui-ci possède. En effet, [elle]''commença à trouver que le maître du logis n'avait plus la barbe si bleue, et que c'était un fort honnête homme.'' Elle n’est même plus effrayée par sa barbe, qui terrorise pourtant tout le monde. C’est sa richesse qui l’attire. Elle est prête à mettre de côté la peur qu’il inspire
pour devenir sa femme et posséder elle aussi sa richesse.
b) Marques de faiblesseLa première marque de faiblesse que l’on peut noter est la naïveté. Elles sont candides et un peu « niaises ». Elles ne réfléchissent pas assez et n’ont pas conscience des dangers qui les guettent. Prenons l’exemple du Petit Chaperon Rouge : elle indique son chemin à un inconnu sans se méfier de lui. Elle ne se doute à aucun moment de ce qui va lui arriver. Aussi, l’ogresse dans le
Petit Poucet fait confiance naïvement à l’enfant en lui confiant sa richesse.
La femme est la plupart du temps soumise à l’autorité des hommes, impuissante voire domestiquée. Lorsqu’elle dispose d’un quelconque pouvoir, cela témoigne en général d’un déséquilibre. Par exemple la belle-mère de Cendrillon fait la loi chez elle mais le narrateur précise bien que le gentilhomme est faible. Griselidis est l’exemple le plus flagrant de soumission féminine. Elle accepte tout de son mari sans rien dire.
Enfin la femme est souvent humiliée volontairement ou involontairement. En effet elle est régulièrement sujette à des moqueries. Si Cendrillon est rabaissée, c’est parce que sa belle-mère l’a décidé. En effet, elle est obligée d'effectuer les pires taches ménagères et est considérée comme une servante. En revanche Fanchon (
Les souhaits ridicules) se retrouve avec une aune de boudin au nez sans que personne ne l’ait réellement voulu.
c) Vision de hommes
L’homme le plus misogyne est le Prince (Griselidis). D’après lui les femmes sont toutes hypocrites, infidèles, orgueilleuses, cupides : « Tant qu’elles sont au sein de leurs familles/Ce n’est que vertu, que bonté/ Que pudeur, que sincérité/Mais sitôt que le mariage/Au déguisement a mis fin/Et qu’ayant fixé leur destin/Il n’importe plus d’être sage/Elles quittent leur personnage ». Pour lui les femmes doivent être soumises aux hommes.
NB : Dans les
Contes, plus les femmes sont âgées, plus elles donnent l’impression d’être sages mais sont en fait manipulatrices et jalouses. La mère de Peau d’âne par exemple est très jalouse : sur son lit de mort, elle demande à son mari d’épouser une femme seulement plus belle qu’elle. La belle-mère de Cendrillon est également très jalouse des qualités de sa belle-fille et se venge en lui faisant faire toutes les corvées de la maison.
II/ Une image positive de la femme dans les contes de PerraultPerrault ne fait pas qu’un portrait négatif de la femme dans ses contes. Au contraire, il met également en relief certaines qualités féminines et montre que grâce à ces qualités, les femmes peuvent triompher. Cependant, certaines qualités restent à nuancer…
a) Les qualitésTout d’abord, les femmes sont sages. En effet, elles savent faire attention à la beauté intérieure plutôt qu’aux apparences comme nous le montrent le conte
Riquet à la houppe, dans lequel la princesse accepte d’épouser Riquet malgré sa laideur ; ou encore le conte
Les Fées dans lequel la jeune fille accepte d’aider la femme, même si elle est vieille et laide.
Elles sont également rusées. Elles savent mettre au point des stratégies pour parvenir à leurs fins. C’est le cas de Peau d’Ane par exemple, qui met sa bague dans la tarte pour que le prince la retrouve.
Si pour certains hommes les femmes sont hypocrites, en réalité elles sont vraies et sincères. Grisélidis est l’exemple même de la sincérité et de l’honnêteté, cependant le Prince la croit fausse et lui fait vivre les pires atrocités.
Ensuite, il y a le travail. Si dans la première partie nous avons décrit la soumission comme une marque de faiblesse de la femme, le travail peut néanmoins être classé parmi les qualités car bien que travailleuses, les femmes ne sont pas résignées. Cendrillon en est l’exemple même. Elle travaille dur pour sa belle-mère et ses demi-sœurs mais garde espoir. De plus il ne faut pas oublier qu’à l’époque de Perrault, une femme qui travaille est une bonne femme. Travailler est une qualité.
Perrault nous montre que les femmes sont battantes. Elles agissent et se battent pour arriver à leurs fins. Elles ne renoncent jamais, malgré la difficulté et l’horreur des situations parfois. Et ceci les place en position de force.
b) Des qualités qui leur permettent de triompherGrâce à leur sagesse, les femmes sont récompensées. La princesse épousant Riquet deviendra intelligente. La jeune fille aidant la vieille femme aura le pouvoir de cracher des diamants et des perles, alors que sa sœur n’ayant pas voulu aider crachera des crapauds et couleuvres…
Ces jeunes filles délaissées au départ, seront ainsi écoutées et admirées, tout ceci grâce à leur bonté.
Grâce à la ruse, Peau d’âne parvient à ses fins. Grâce à la bague, le prince va la retrouver et finalement l’épouser, ce que désirait Peau d’âne.
Elle a, grâce à sa ruse, réussit à obtenir le mariage qu’elle voulait et ne doit plus avoir à se cacher de son père.
Grâce à sa sincérité de tout instant, Grisélidis va finalement triompher car le roi va se rendre compte de ses erreurs et essayer de les réparer.
Grâce au travail, la femme se pose comme quelqu’un de forte. Finalement c’est elle qui a le pouvoir. En travaillant pour sa belle-mère, Cendrillon paraît faible, pourtant c’est elle qui a le pouvoir car c’est elle qui agit. La belle mère ne sait rien faire et devient faible car sans Cendrillon, elle n’a plus rien. Cendrillon triomphe sur sa belle-mère.
C’est la dialectique du maître et de l’esclave d’Hegel.
En étant battantes, les femmes ont ainsi le pouvoir sur les hommes qui, eux, n’ont pas à se battre pour avoir ce qu’ils veulent. Dans chacun des contes, aucun homme ne se bat, tous sont passifs. Le Roi dans
Grisélidis se perd dans la forêt et doit se faire raccompagner par Grisélidis, Peau d’âne doit mettre une bague dans sa tarte pour que le prince la retrouve, dans La Belle au bois dormant la forêt s’écarte devant le prince qui n’a plus qu’à avancer…
Finalement, grâce à leurs qualités et à leur force, les femmes triomphent sur les hommes.
c) Des qualités à nuancerCependant, si les femmes dans les contes de Perrault possèdent certaines qualités indiscutables, d’autres sont à nuancer…
Dans plusieurs contes de Perrault, les femmes font preuve d’une patience et d’une docilité à toute épreuve. Le plus bel exemple est celui de Grisélidis qui se montre très patiente et ne se plaint jamais. Son mari a tout pouvoir sur elle. Elle accepte qu’il lui fasse subir les pires choses. Perrault semble fier de Grisélidis qu’il qualifie de « modèle de patience » et qui selon lui « serait partout une chose étonnante » (lettre à Mademoiselle…). Mais lorsque l’on voit le sort de cette pauvre Grisélidis, on est en droit de se demander si sa patience est réellement une qualité…
Les femmes sont également décrites comme généreuses, gentilles et jamais
rancunières. Mais s’agit-il vraiment de qualités ?
Observons le cas de Cendrillon : ces deux demi-sœurs lui font vivre un cauchemar. Ces filles sont atroces. Et pourtant Cendrillon ne leur en veut pas. Elle accepte son sort et ne se plaint pas. Est ce une qualité ?
Etre gentille est une bonne chose, mais il ne faut pas trop l’être car après on se sert de vous, comme le font les sœurs de Cendrillon.
Enfin, se pose la question de la beauté des femmes chez Perrault. Dans les contes, toutes les héroïnes sont des femmes belles, voire très belles. La seule femme laide est l’une des deux princesses dans le conte
Riquet à la houppe, mais sa laideur est compensée par l’intelligence, de plus ce personnage n’est pas le personnage principal du conte.
La beauté est-elle vraiment une qualité ? Si ces femmes n’avaient pas été
belles, auraient-elles été héroïnes des contes ? Leur beauté ne les rend-elle pas superficielles ?